J’habite à Lausanne City

Le voyageur qui à Lausanne s’engouffre dans le sous-voie CFF à sa descente du train, se trouve aujourd’hui face à une signalétique lui proposant une double direction: ‘Lac’ au sud ou ‘City’ au nord.
Une erreur de traduction serait-elle à l’origine de cette incohérence linguistique? Ou les alentours du Petit-Chêne se seraient-ils soudainement mués en nouveau centre de la finance internationale?

Vous n’y êtes pas. C’est que subrepticement, par le truchement de notre Régie fédérale, les grâces de la langue suisse-alémanique s’infiltrent dans nos terres.
Cette utilisation anarchique du lexique est en effet fidèle à l’approche décomplexée de nos confédérés, qui se délectent à emprunter de multiples expressions aux langues étrangères. En matière de lieux, cette tendance est particulièrement lourde à Zurich, où des espaces urbains baptisés Shopville côtoient les autres Sihlcity. Dans la capitale économique, cette manie répond par ailleurs à une coquetterie bien connue, les Zurichois aimant donner à leur ville, par force slogans, des airs de métropole du monde (‘grossstädtisches Flair’ dans l’idiome du coin). Il y a ainsi belle lurette que l’automobiliste qui s’y rend doit choisir à l’intersection autoroutière entre ‘Zürich-Flughafen’ et ‘Zürich-City’.

Pour revenir à notre contexte francophone, de tels emplois apparaissent malheureux, pour ne pas dire ridicules. Espérons que le présumé groupe de réflexion ‘Signalétique’ des CFF, qu’on imagine doté d’excellents spécialistes, puisse accueillir en son sein un fonctionnaire romand, investi de la mission de rendre à notre langue ses lettres de noblesse. Ou résignons-nous, et proposons à l’Académie française de rayer le mot ‘centre-ville’ de son dictionnaire, devenu décidément obsolète.

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